Tout a commencé dans les Rocky Mountains
Mais d’où vient ce terme négaWatt et cette abbréviation nW ? Le terme a été développé par Amory Lovins, scientifique américain et directeur du Rocky Mountain Institutes (RMI), une structure qui est à la fois un centre de recherches et une ONG qui travaille dans le domaine de l’énergie et de l’environnement. Certains d’entre vous connaissent peut-être Amory Lovins, car il est l’un des trois auteurs du livre ‘Facteur 4’ (la version fr. a été publié en 1997 aux ed. Terre Vivante), un ouvrage qui a connu un certain succès et qui démontrait par de multiples exemples que l’on pouvait vivre avec deux fois plus de confort, tout en consommant deux fois moins d’énergie.
En 1990, Amory Lovins utilise pour la première fois le terme de négaWatt. Avec ce nW, il entend donner un nom aux économies d’énergie, afin de pouvoir développer des concepts sur ce thème. Suite à une rencontre à Paris entre Amory Lovins et plusieurs spécialistes français des questions énergétiques, l’association française verra le jour. Officiellement en septembre 2001. L’idée de base est la suivante : nous vivons dans une ébriété énergétique, nous n’avons pas besoin de Mégawatts supplémentaires, nous devons apprendre à comprendre et économiser l’énergie ou à produire des négaWatts en repensant nos besoins en énergie.
La naissance de négaWatt est à replacer dans un contexte énergétique français qui était à l’époque très marqué par le poids d’EDF (Electricité de France), le seul opérateur national qui dans les années 70 met en place une politique du tout nucléaire, notamment sous la houlette du Premier Ministre Pierre Messmer. Les voix et les analyses discordantes sont rares. Parmi les exceptions, citons néanmoins le Plan Alter, un travail de prospective fait un groupe d’experts indépendants (Philippe Chartier, Philippe Courrèges,Théo Leray et Benjamin Dessus) qui s’étaient regroupés sous le nom de ‘groupe de Bellevue’ et qui étaient issus du CNRS, du Collège de France, d’Electricité de France et de l’Institut national de la recherche économique. Ils étaient tous professionnellement impliqués dans les recherches sur les énergies renouvelables. Dans le préambule sur ce travail publié en 1978 aux éditions Syros, on peut lire: « Frappé par la timidité de la prospective énergétique actuellement disponible pour la France, ce groupe a naïvement entrepris, avec les moyens du bord, l’étude d’un scénario énergétique axé sur le potentiel renouvelable. » Ce travail de 66 pages est bien documenté. Il avait pour but « d’évaluer ce que peut être pour la France un avenir énergétique axé, à long terme, sur l’énergie solaire et ne faisant pas ou très peu (et seulement à court terme) appel à l’énergie nucléaire. » Il influencera grandement celles et ceux qui forgeront par la suite l’analyse négaWatt.
Philippe Bovet – président de l’association négaWatt Suisse